L’insuffisance professionnelle est un motif de licenciement sui generis, qui répond à des conditions de validité précises énumérées par la jurisprudence, mais ce motif ne relève pas du droit disciplinaire.
Même si l’insuffisance de résultat ou insuffisance professionnelle est un motif soulignant une forme de défaillance du salarié, cette défaillance n’est pas considérée comme une faute, c’est-à-dire un manquement conscient et volontaire.
De ce fait, ce n’est pas un licenciement disciplinaire et la procédure à appliquer est la procédure classique.
Si la notification ne peut intervenir qu’après le même temps de réflexion de 48 heures après l’entretien préalable, il n’y a pas de limite d’un mois imposée. La jurisprudence parle de « délai raisonnable » pour notifier le licenciement, ce qui en toute logique ne peut dépasser quelques semaines.
En tout cas, une notification un peu tardive n’invalidera pas le licenciement prononcé.
Définition de l'insuffisance professionnelle
Le motif d'insuffisance professionnelle consiste dans le constat qui est fait de l’incapacité d’un salarié à exécuter son travail de façon satisfaisante.
Cette incapacité se traduit par l’insuffisance des résultats ou objectifs atteints par rapport à l’attendu pour un salarié aux mêmes compétences et expériences, malgré sa bonne foi et ses efforts.
C’est un motif jurisprudentiel, c’est-à-dire qu’il s’est construit au gré des décisions de justice. Les conditions pour licencier valablement au motif d’insuffisance professionnelle (ou insuffisance de résultat, plus applicable aux emplois commerciaux), sont ainsi établies de façon stable par la jurisprudence constante de la cour de cassation :
- Les objectifs qualitatifs ou quantitatifs doivent avoir été fixés au salarié de façon claire (écrite), à temps (en début d’année pour des objectifs annuels, et non au milieu de l’année…), et avoir été compris et acceptés par le salarié,
- Ces objectifs doivent être accessibles dans des conditions normales d’activité, d’ancienneté de métier et de formation,
- L’insuffisance doit avoir été objectivement constatée et déjà signifiée au salarié, sans équivoque, de façon à lui permettre une amélioration de ses performances dans un délai donné. De nouveaux objectifs aménagés peuvent alors être fixés, ou au contraire une réitération des objectifs initiaux mais avec un accompagnement : une formation d’amélioration ou de soutien et développement des compétences attendues peut être proposée, et/ou encore un suivi régulier de son activité et des rencontres avec sa hiérarchie.
Des mesures d'accompagnement
En résumé, des mesures d’accompagnement doivent être proposées au salarié pour lui donner une chance de s’améliorer.
- Ce n’est que si l’amélioration ne se produit pas au terme du délai fixé et compte tenu des mesures de soutien proposées, que l’employeur peut alors notifier le licenciement.
- La non-atteinte des objectifs ou résultats doit pouvoir être quantifiée objectivement et matériellement démontrée (production de chiffres), et être significative.
- Il est également attendu de l’employeur qu’il puisse démontrer que les autres collaborateurs affectés au même type d’emploi, dans le même type de marché, à des conditions similaires d’expérience et de formation, réalisent de meilleures performances.
La comparaison entre les performances de divers salariés doit prendre en compte le niveau d’expérimentation ou les outils fournis (logiciels informatiques par exemple), la gamme de produits confiés ou encore la taille du secteur de prospection. - Enfin, le salarié doit avoir été affecté à une mission pour laquelle il est correctement formé, notamment si ses fonctions ont évolué au cours de sa carrière dans l’entreprise.
Les obligations de l’employeur
Il est rappelé que l’employeur a une obligation générale de maintenir l’adaptation de ses salariés à leur poste de travail, et leur capacité à occuper un emploi compte tenu de l’évolution des technologies et des organisations (article L6321-1 du code du travail).
Ces multiples conditions et cette construction du motif sont souvent oubliées par l’employeur qui entame une procédure de licenciement sans avoir jamais officiellement prévenu le salarié de son insuffisance.
Les conseils de prud’hommes saisis d’une contestation d’un tel licenciement prononcent la requalification en licenciement sans cause réelle ni sérieuse. >> En savoir plus sur la requalification d'un licenciement
Le licenciement pour insuffisance professionnelle est souvent fragilisé par une notification qui mélange des reproches de nature disciplinaire au strict motif d’insuffisance. L’employeur pense ainsi renforcer sa lettre de licenciement, or souvent au contraire il dénature l’insuffisance professionnelle en motif disciplinaire, et peut se voir reprocher de ne pas avoir appliqué la procédure correspondante.